Syrie : retour à l’instinct grégaire (010103/21) |
lundi, 01 mars 2021 | |
© Metula News Agency
Michaël
Béhé, Stéphane Juffa et Jules Mazouz ont participé à la rédaction de cet
article
Métula, lundi après-midi.
SANA – AFP – Figaro – Médiapart,
même combat !
Que l’agence de propagande de la dictature syrienne SANA,
et sa télévision annoncent après chaque raid israélien avoir abattu tous les
missiles du Khe’l Avir – l’Aviation israélienne – ou la plupart d’entre eux, il
n’y a rien d’exceptionnel à cela.
SANA ne recherche pas l’objectivité de l’information dans ses
communiqués, mais elle s’emploie à présenter une image flatteuse de l’Armée
gouvernementale syrienne et de son gouvernement.
Il suffit à un enfant moyennement éveillé de 12 ans de se
rendre sur le site Internet de cette entité, qui propose notamment un onglet en
français, http://www.sana.sy/fr/ , pour s’en apercevoir.
Après chaque attaque, les Syriens diffusent des vidéos
censées montrer des interceptions de missiles air-sol israéliens, et cela nous
fait chaque fois beaucoup rire. Ce qu’ils montrent en réalité, ce sont des tirs
de missiles sol-air obsolètes dans tous les points cardinaux, mais
jamais une interception. Parfois ils explosent en vol suite à la décision des
servants des batteries, afin que leurs missiles ne retombent pas sur des
quartiers peuplés. Souvent ils sont incapables d’empêcher cela et les missiles
tuent des compatriotes.
Intercepter un missile en plein vol n’est pas une mince
affaire, particulièrement un Dalila ou un Popeye de dernière génération,
spécifiquement conçus pour surmonter les technologies connues de défense
anti-aérienne.
A notre connaissance, peu de pays disposent des moyens pour
accomplir un tel exploit, et assurément, aucun de ceux présents en Syrie et qui
participent à la Guerre Civile.
Cette remarque vaut pour les Russes et leur système S-400,
largement plus sophistiqué que ceux dont ils ont doté l’Armée de Bashar al
Assad.
Sur cette vidéo commerciale, on peut se rendre compte à
quoi ressemble l’interception d’un missile en vol – même s’il ne s’agit pas
d’un Dalila ou d’un engin de sa catégorie – et se faire une idée de la
différence existant entre ces images et celles de la télévision syrienne :
L’une des vidéos présentées par la TV gouvernementale de
Damas après un raid israélien la nuit dernière :
On peu également, lorsque l’on désire sincèrement savoir de
quoi l’on parle et que l’on a pris l’engagement d’informer le public,
questionner un spécialiste de l’Armée française, d’active ou à la retraite.
Nous répétons pour notre part ce que nous écrivons
régulièrement, à savoir qu’aucun missile de l’Armée syrienne n’a jamais abattu
un Dalila, pour la raison simple mais suffisante qu’ils ne disposent pas de la
technologie adéquate pour y parvenir.
Et pour l’autre raison, que le Khe’l Avir ne lance pas lors
de ces raids des dizaines de missiles, mais exactement le nombre requis afin de
détruire les objectifs qu’il s’est fixés. Et qu’ils sont chaque fois
entièrement détruits, comme en témoignent les images satellitaires que la Ména
propose souvent quelques jours après un raid.
Suivant les appareils, les types de missiles et les
missions à accomplir, les avions en emportent 2 ou 4. Et leur nombre est limité
au strict nécessaire ; nous ne désirons pas en parler, mais il ne s’agit
jamais d’essaims de 50 bombardiers, ni même de 10 par objectif, et même bien
moins que cela.
Si sur un site de fabrication d’armes, comme nous l’avons
récemment documenté lors d’une attaque au nord de la ville de Masyaf, tous les
ateliers et les entrepôts sont détruits, c’est la preuve qu’aucun missile
offensif n’a été intercepté ou n’a manqué sa cible. La démonstration est
simple, mais elle est également suffisante.
Nous l’effectuons pratiquement après chaque opération,
parce qu’il nous importe de connaître le résultat des raids et de pouvoir ainsi
nous mettre à jour sur les capacités de nuisance de l’ennemi en temps réel.
L’annonce répétitive par SANA des
pseudo-interceptions de missiles par la DCA syrienne ne fait pas rire que nous.
Cela amuse les gens dont le métier consiste à couvrir ce domaine d’activité,
dont plusieurs journalistes spécialisés, avec des confrères arabes parmi eux,
et nous en parlons naturellement entre nous.
Récemment, l’officine de propagande qatarie basée au
Royaume-Uni et pompeusement intitulée Observatoire Syrien des Droits de
l’Homme, a été tournée en dérision par la presse internationale spécialisée
pour avoir rapporté une annonce gouvernementale syrienne selon laquelle la DCA
d’Assad aurait abattu "la plupart des missiles israéliens" lancés
lors d’un raid.
Il est encore plus surprenant que l’AFP, et partant,
tous les media tricolores, reprennent à chaque occasion et automatiquement les
contenus münchhausiens de l’OSDH ou des media de la dictature alaouite.
Ne serait-ce que parce qu’ils se sont avérés délirants à des dizaines de
reprises.
Reste que cette nuit, l’AFP et les media français
ont franchi un nouveau seuil dans la désinformation intentionnelle au
Moyen-Orient. Ils ne se sont en effet pas contentés de citer les déclarations
de SANA, ce qui n’était déjà pas très futé, ils les ont prises à leur
compte pour en faire le titre de leur dépêche :
"Des missiles israéliens tirés sur Damas interceptés",
retrouvait-on sur Le Figaro, Médiapart, H24Info, Mosaïquefm,
l’Orient-le-Jour, etc.
Souvent, ces supports tentent de se justifier en arguant
que l’Armée israélienne ne diffusant généralement pas de commentaires sur les
opérations en Syrie, ils ne peuvent que rapporter les informations des sources
gouvernementales de Damas, qui elles en produisent.
Même en sachant d’expérience que ces nouvelles sont
fausses ?
Nous n’avons décidément pas la même perception de notre
métier. Nous restons dans l’impression que l’AFP, principalement, mais certains
de ses revendeurs également, s’attèlent à diffuser ces fake news afin de
contrer les real news de la Ména. Plus nous expliquons les choses, images
satellites, connaissances technologiques et logique à l’appui, plus ils
s’abreuvent aux sources frelatées que sont l’OSDH et SANA pour
nous démentir. Sans même s’aventurer à chercher à saisir l’étendue du non-sens
qu’ils propagent.
Certains, à côté du titre "Des missiles israéliens
tirés sur Damas interceptés", à l’instar de Médiapart, ont ajouté
"(média d’Etat)". Comme si cela atténuait la faute journalistique
consistant à rapporter une source non fiable, qu’elle soit d’Etat ou non, et de
quel Etat, une dictature brutale.
Et surtout d’en faire un titre, c’est-à-dire de se porter
caution du choix de la propagande de Bashar al Assad.
Ils sont mus par un parti pris assez hideux consistant à
dénigrer Israël, son Armée, son gouvernement et sa population chaque fois que
c’est possible. Cela part d’une démarche journalistique originale.
Nous, c’est exactement le contraire : nous ne suivons
aucun agenda. Si les Russes, les Syriens, les Iraniens ou les Pachtounes
développaient par exemple un missile sol-air capable d’abattre un Dalila, et
qu’Assad en interceptait un ou pire, un F-15 et ses pilotes, nous nous ferions
fort d’être les premiers à le rapporter. Parce que l’info, cela relate, cela
n’invente pas. D’ailleurs, lorsque le 10 février 2018 un F-16 du Khe’l Avir
avait été abattu sur le Golan, suite à une erreur de l’équipage, la Ména avait
effectivement été le premier media à l’annoncer. Les choses sont tellement plus
parlantes lorsqu’elles sont démontrables et surtout, lorsque pour faire du
journalisme, on ne hait personne.
La
nuit dernière, Israël a mené des raids dans la région de Damas :
La nuit dernière, à partir de 22h16 en Syrie et en Israël,
selon des sources concordantes, des appareils arborant l’étoile de David ont
attaqué plusieurs positions ennemies dans la périphérie de la ville de Damas.
En dépit d’intenses recherches, nous ne sommes pas parvenus
à identifier avec précision les objectifs visés, et c’est une première.
Ce que nous sommes à même de révéler est que tous les
appareils sont rentrés intacts à leurs bases, que les cibles ont été atteintes
et totalement détruites, et qu’aucun missile – sans doute des Dalila de
dernière évolution – n’a évidemment été intercepté par la DCA ennemie.
On sait aussi que les objectifs principaux se situaient
entre la capitale syrienne et la frontière israélienne du Golan, dans un
losange constitué des agglomérations de Darraya et Set Zaynab au Nord, et Qatan
et al Kisweh plus au Sud, ces quatre lieux étant sis entre la périphérie
immédiate de Damas et 15km au sud-ouest d’icelle.
Nous savons également que les positions oblitérées étaient
occupées par les Gardiens de la Révolution khomeyniste iraniens, leurs
supplétifs chiites d’autres nationalités, et des miliciens du Hezbollah
libanais.
Cette opération a fait des victimes parmi ces personnels,
mais aucun soldat ou civil syrien n’a semble-t-il et blessé une fois de plus.
Cela témoigne d’une synchronisation évidente entre les hauts commandements des
armées israélienne et syrienne sur fond de médiation russe.
Les rapports lacunaires dont nous disposons nous indiquent
que des postes de commandement, ainsi que des entrepôts d’armes et de munitions
ont été détruits dans l’attaque.
Mais cette opération sort de l’ordinaire, en cela que si
elle a bien été massive, elle n’a pas généré les immenses explosions auxquelles
nous sommes habitués. Il apparaît qu’un
objectif stratégique a été visé mais nous n’en connaissons pas la nature.
Le mutisme absolu quant à l’objectif central de ce raid,
des deux côtés de la frontière, laisse à penser qu’il s’est agi d’une cible
importante à primordiale pour le déploiement iranien en Syrie.
Nous n’en savons pas davantage pour le moment. A part que
la DCA d’Assad a lancé des projectiles antimissiles dans toutes les directions,
occasionnant un joyeux feu d’artifice.
Il se peut également que d’autres objectifs, notamment une
position située à une quinzaine de kilomètres au nord-est de Damas, aient été
pris pour cibles. Nous n’avons pas de confirmation de cette frappe, mais elle
est plausible d’après nos sources.
Michaël Béhé n’est pas parvenu à parler à un responsable
médical en dépit de ses tentatives dans la nuit et ce matin.
Nous ne manquerons pas de revenir sur ces raids au cas où
nous obtiendrions des informations plus précises. Ce qui est aussi acquis,
c’est que l’opération de la nuit dernière ne constituait pas la riposte à
l’agression contre le roulier israélien Helios Ray en mer d’Oman, comme
beaucoup de media israéliens s’étaient empressés de l’annoncer. Ce, parce que Binyamin
Netanyahu a promis ce matin que l’Etat hébreu mènerait des représailles.
Sur la radio publique, Kan reshet Bet, il a
déclaré : "C'est clairement une opération iranienne, c'est
évident". Lorsque le confrère lui a demandé si Israël allait réagir, il a
répondu : "Vous connaissez ma politique". Cette dernière phrase fait
de nous des voyants extralucides capables de prédire que la vengeance d’Israël
se produira d’ici les élections, voire immédiatement avant, qu’elle aura lieu
en Iran et qu’elle sera spectaculaire.
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